L'ADMINISTRATION  COMMUNALE  PENDANT  LA  2ème GUERRE

Avant 1939

A la veille de la guerre, le maire est M. Léopold BOUCHER, il est assisté de deux adjoints: Léonce LEGRAND et Gaston GUERIN.
Le Conseil Municipal est composé en outre de Messieurs Georges DUCROTOY, Elie LEROUX, Arthur BRUNET, Désiré SALLEMBIEN, Narcisse CARON, Emile VASSEUR, Henry de FRANCQUEVILLE, Henry FOURNY et Paul SEHET.
Les élections avaient eu lieu en 1935.
Le secrétaire de mairie, instituteur, est M. THERY Roger. Le garde champêtre est, depuis 1929, M. Ovide MULOT.

La guerre éclate…

Suite à la déclaration de la guerre le 3 septembre, M. THERY est rappelé. C’est Mademoiselle Marthe CONSTANTIN qui le remplacera au secrétariat.
De septembre 1939 à mai 1940, le Conseil ne se réunira que deux fois : en novembre 39, où il sera question de secours en pain et en charbon et en février 1940 ; jamais, la guerre ne sera évoquée.
En mai, c’est l’invasion de la France et le bombardement de La Chaussée-Tirancourt, le 20. S’en suivent alors la débâcle et l’exode d’une bonne partie des habitants.

Constitution d’un Comité de Guerre

Une fois la bataille de la Somme terminée, la population commence à revenir. Quel triste spectacle! Des maisons sont détruites suite au bombardement, d’autres sont pillées tandis que des animaux sont morts….

Une fois l’Armistice signé, les Allemands mettent en place un système rigoureux d’occupation de la Somme. La France est coupée en deux zones : une zone libre au sud et une zone occupée au nord.
A l’intérieur de la zone occupée, les Allemands créent une autre ligne de démarcation qui suit la rivière Somme dont les ponts sont gardés par des militaires. Tout passage est interdit aux personnes qui n’ont pas de laisser-passer (Ausweis). C’est ainsi que pour se rendre à Picquigny, il faut un «Ausweis», délivré par la mairie et contresigné par la Kommandantur.
Les personnes qui sont évacuées en Bretagne ou dans le midi, n’ayant pas ce précieux laisser-passer, ne peuvent donc revenir dans l’immédiat et devront attendre. Cette ligne de démarcation cessera d’être gardée militairement en décembre 1941.

La France partagée…

En plus des Ausweis, l’administration allemande oblige les personnes qui se déplacent pour des raisons professionnelles, à être en possession d’attestations (Bescheinigung) justifiant de leurs déplacements.

L’ausweis est obligatoire pour aller à Picquigny…

Les Allemands voulant des interlocuteurs dans chaque village, afin de mieux asseoir leur autorité, créent des Comités de Guerre en remplacement des Conseils Municipaux, dont la plupart des membres sont encore absents.
Le 28 juillet 1940, un Comité de Guerre est créé à La Chaussée-Tirancourt. Les membres sont choisis parmi les habitants rentrés d’évacuation.

Président : Arthur BRUNET
Vice-Président : Eugène LORINET
Membres : DUCROTOY Georges, LEROUX Elie, SEHET Paul, CARON Narcisse, conseillers municipaux en exercice, et deux autres personnes extérieures au conseil: Léon GEORGES et Adrien CAMPIGNEUX.
Arthur BRUNET, Président du Comité de Guerre de La Chaussée-Tirancourt

Jusqu’en décembre 1940, le comité aura pour principale attribution, la distribution des tickets de rationnement, ainsi que le ravitaillement en pain, en viande et en charbon.
Le 8 septembre 1940, une délibération est prise en vue de distribuer le charbon équitablement. En outre, le comité décide de bien entretenir les tombes des « malheureuses victimes » du bombardement du 20 Mai ainsi que la tombe du soldat enterré au lieu-dit le Camp Jean Denamps (Camille RICHARD).

Le conseil revient

De janvier à mai 1941, c’est M. GUERIN Gaston qui fait fonction de Maire, en remplacement de M. BOUCHER, malade.
Le conseil doit s’occuper des dommages de guerre et des allocations aux réfugiés de passage.
Le Préfet de la Somme est venu sur place afin de voir les dégâts et a rencontré M. GUERIN.
Sur la proposition d’un membre du conseil, il est décidé que le corps du malheureux soldat RICHARD, enterré dans les champs sera inhumé au cimetière communal avant les rameaux et qu’il lui sera fait un cercueil.
Le 27 avril, M. GUERIN démissionne, il sera remplacé le 7 Mai par M. Henry de FRANCQUEVILLE.
Jusqu’à la libération de la commune, le Maire et son conseil gèreront au mieux les intérêts de la commune et s’attacheront à faire que la vie quotidienne des habitants soit la meilleure possible:
- Vu la pénurie de charbon, il sera décidé d’abattre des peupliers
- Des colis seront envoyés aux prisonniers
- Plusieurs familles seront assistées
- Les salaires des employés communaux sont augmentés
- Assistance médicale gratuite pour les plus pauvres
- Distribution de pain et de charbon

Sous l’impulsion des autorités de Vichy, à la solde des Allemands, certaines mesures sont prises par le Conseil Municipal:

- Achat du portrait du Maréchal Pétain (24/09/41)
- Installation du crucifix dans l’école et à la mairie (11/04/42)
- Assistance à la famille (23/12/42)
    - Le père doit être électeur
    - Il faut que ce soit un ménage régulier
    - Etre résident depuis 6 mois
    - 100 F après le 3ème enfant.

Le 11 avril 1942, M. le Maire fait savoir au conseil qu’il a reçu une lettre du Maire de Boissey (Ain), en zone libre qui l’informe que la jeunesse du pays a «adopté» la commune de La Chaussée-Tirancourt, victime du bombardement le 20 Mai 1940. Les jeunes de Boissey ont fait une quête qui a rapporté la somme de 600 F.

En 1942, la population du village est de 431 habitants. M. le Maire fait réparer et curer les puits communaux et fait réinstaller la cabine téléphonique au café Lorinet, puis chez Mme Veuve NIQUET.
Pendant les hostilités, le conseil diminue les baux de pêche et supprime momentanément la Société de chasse étant donné que la chasse est interdite.
Durant les mois d’hiver les familles dans le besoin reçoivent 50Kg de charbon.
Dès 1943, le conseil se préoccupe de la réparation des bâtiments communaux (école, mairie, bâtiment à pompe, église). M. GUILLOU, architecte à Amiens est retenu. Les dépenses s’élèvent à 160 240F. L’état est sollicité pour une aide.
En juillet 1944, M. le Maire fait réouvrir les souterrains du Camp de César, en vu d’y établir un abri de «défense passive» pour la population. Les travaux s’élèvent à 9527 F, une quête dans le village permettra de recueillir 6496 F.

La Libération

Le 30 Août 1944, c’est la débandade dans les rangs nazis qui fuient en désordre, se rendent par dizaines, volent des vélos, des voitures ou commettent une dernière exaction. Le village de La Chaussée est bombardé, mitraillé, on notera quelques blessés. La Résistance s’organise. Les chars alliés arrivent…
Le 1er septembre, notre village est enfin libéré du joug de l’oppresseur.

Malheureusement, le Maire, M. Henry de FRANCQUEVILLE trouve la mort, à l’angle des rues de Vignacourt et de Tirancourt. Il succomba d’une hémorragie, après avoir pris une balle dans l’artère fémorale de la jambe droite. M. de FRANCQUEVILLE venait de procéder à une dernière distribution de pain.
Henry de FRANCQUEVILLE, Maire de La Chaussée-Tirancourt, est dédédé le 1er septembre 1944.

M. Léonce LEGRAND, adjoint, fera fonction de maire jusqu’en décembre.

Narcisse CARON, Maire

Source : "Picardie Libre" (Archives Départementales de la Somme - 172 W1)
Document communiqué par Dany Dheilly.

Remarque : Le Front National, ou Front National de l'indépendance de la France est une organisation de la Résistance française de la Seconde guerre mondiale. Il prend son nom du Front populaire alliance politique des partis de gauche de la fin des années trente.

Sur la proposition du Comité Départemental de la Libération de la Somme, le Conseil Municipal de La Chaussée-Tirancourt est ainsi constitué :
GUERIN Gaston, CARON Narcisse, DUCROTOY Georges, DUFRENOY Clotaire, FERTEL Marcel, LEGRAND Léonce, LEMAITRE Hubert, LENGLET Fernand, SEHET Paul et VASSEUR Emile.

Le 26 décembre, M. Narcisse CARON est élu maire de la commune alors que M. Emile VASSEUR devient premier adjoint.

Jusqu’à la fin des hostilités et même après, Narcisse Caron continuera l’œuvre entreprise par ses prédécesseurs, ce qui lui vaudra la reconnaissance du Ministre de l’Intérieur, en 1947, qui lui attribuera la médaille de bronze pour sa « courageuse conduite ».

Narcisse CARON, Maire de La Chaussée-Tirancourt
de 1944 à 1953

Le 28 Janvier 1945, les chasseurs retrouvent leur passion avec joie.
Les locataires du marais renoncent au droit de chasse «au seul profit des chasseurs du pays qui en avaient manifesté le désir moyennant une redevance de mille francs qu’ils ont répartie entre eux et pour jouir de ce droit jusqu’au 31 Mars 1945».
En Mars 1945, le Conseil décide de faire graver les noms des victimes civiles du 20 Mai 1940 sur le monument aux morts, de faire élaguer les tilleuls du vieux cimetière et de faire poser une plaque commémorative en l’honneur de M. de FRANCQUEVILLE.

Diplôme décerné à M. CARON, maire.

Les premières élections libres

Les élections ont lieu les 29 Avril et 16 Mai 1945. Sont élus : CARON Narcisse, LEMAITRE Hubert, VASSEUR Emile, LENNE Camille, LENGLET Fernand, VICART Léon, VIGNON Michel, FERTEL Marcel, LEGRAND Léonce, DETRE Rémy.
Le 18 Mai, Narcisse CARON est élu maire et Emile VASSEUR, premier adjoint.
Une des premières tâches du nouveau conseil sera de commémorer et d’organiser « la fête nationale qui doit cette année revêtir un caractère exceptionnel puisque depuis 5 ans, c’est la première fête de la Liberté retrouvée ».

Voici le programme :
1. vendredi 13 : grande retraite aux flambeaux à 22 heures avec le concours des sapeurs pompiers, des autorités locales et des enfants des écoles.
2. samedi 14 : organisation d’une fête dans le marais,
    - concours de pêche de 9H à 11H,
    - distribution des prix à 11H à l’école,
    - distribution de gâteaux aux enfants,
    - revue des pompiers à 16H,
    - jeux au marais : courses à la grenouille, courses à pied, jeux de ciseaux, bal d’enfants,
    - concours de ballon au poing,
    - concours de cartes.

Tous ces concours sont dotés de prix. De plus, un livret de caisse d’épargne de 50F sera offert aux enfants qui ont été reçus au certificat d’études.

Le retour des prisonniers et internés

Peu à peu, les prisonniers rentrent de captivité. Tant bien que mal, la vie reprend le dessus. Jamais ils ne pourront oublier les années perdues, les privations et les souffrances !
Léon VICART apprend à son retour qu’il a été élu au Conseil Municipal… M. THERY rentre en Août 1945 ; le 28, il redevient secrétaire de mairie et assiste avec joie à la réunion du conseil. Quant à la rentrée des classes, il la fera avec ses élèves dans la salle de la mairie, à l’étage.

M. THERY fait classe dans la salle du conseil.