LA  NAISSANCE - LE  BAPTÊME

Au XVIIIème siècle, le baptême a lieu le jour même, (rarement le lendemain de la naissance), à cause de l’importante mortalité infantile à cette époque.

Il arrive parfois que ce soit la sage-femme qui «baptise» à la maison quand il y a danger de mort pour l’enfant qui vient de naître. La sage-femme est quelquefois appelée «matronne» (Marie VINCHENEUX puis Louise BONDOIS en 1699 et Madeleine GUYON en 1772…). A plusieurs reprises, il est fait appel à un «chyrurgien» de Picquigny (Louis TURBAN par ailleurs mayeur de Picquigny) ou de Saint Sauveur. Il s’appelait BULOT (cf : 25 mars 1767).

Quand la sage-femme baptise, on dit qu’elle «ondoie», puis le bébé est amené à l’église où le prêtre supplée à la cérémonie.

Quelques enfants ondoyés ont été relevés dans les registres paroissiaux :

Le 2 avril 1719 un enfant de Charles HULOT et Charlotte MAILLARD, ondoyé par Eloy FRERE, tisserand.
Le 7 février 1762 un enfant de Sieur J.B. THUILLIER et M.A. LEBLOND.
Le 9 janvier 1763 un enfant de Pierre Louis THUILLIER et Marie MERCIER.
Le 7 juillet 1765 un enfant de Joseph CAUCHY et M.F. FOURNY.
Le 25 Mars 1767 un enfant de J.H. CARPENTIER et Angélique STALEN.
Le 11 janvier 1769 un enfant de Ch. HULOT et M.F. LEJEUNE par le Sieur BULOT, «chyrurgien» de Saint Sauveur. Cette pratique a survécu jusqu’à récemment.

On trouve dans les registres beaucoup d’enfants « baptisés sous conditions ». (Le 16 septembre 1784, Marie-Geneviève BELLARD et le 4 juillet 1785, Hilarion VINCHENEUX…)

LE PARRAIN ET LA MARRAINE

L’enfant a un parrain et une marraine. Dans la majeure partie des cas, le garçon prend le prénom de son parrain, la fille celui de sa marraine.
Le fils aîné prend souvent le prénom de son père, surtout quand ce dernier vient de décéder.
Dans quelques cas, le prénom peut être aussi le nom du Saint du jour; le prêtre mentionne alors par exemple: «Le 21 octobre, jour de la Saint Ursule est né Ursule, fils de…»

C’est la même chose pour Noël, Pâquette, Noëlle, Jean-Baptiste, Martin…

LES JUMEAUX

J’ai remarqué un nombre assez important de jumeaux (ou jumelles), le prêtre écrit alors: «frères (ou sœurs) d’une même ventrée» ou «tout d’une ventrée».

Il y a même eu des «triplés» en 1791, ils ne vécurent que quelques jours (Constant, Luriette et Marie-Madeleine LENOIR).

Entre 1737 et 1746, il y eut 7 jumeaux : BONDOIS, MARCHAND, HORVILLE, DOMONT, CARON, DOURLE, CARON.

Et entre 1761 et 1765, il y eut 4 jumeaux : GIROUX, DUPUIS, COTIN et FRERE.

LES PRENOMS

Les prénoms les plus répandus sont :

- pour les garçons : Charles, Claude, Antoine, Louis, Jean, Nicolas, Jacques, François, Adrien…
- pour les filles : Madeleine, Marguerite, Barbe, Marie, Geneviève, Louise, Catherine, Françoise…
A partir de 1780, de nouveaux prénoms apparaissent : Vénérande, Adélaïde, Opportune, Scholastique, Dorothée, Pacifique…
Les prénoms de 1709 à 1715
Nombre de Naissances
du parrain ou de la marraine

du père ou de la mère

du Saint du jour
Autres
159*
90
19
3
47**
*    dont 6 naissances de jumeaux
** il est amusant de constater des «modes» (Geneviève entre 1709 et 1711; François, Françoise, Marie-Françoise entre 1712 et 1714).

LES FILLES – MERES

Quand une fille-mère accouche, elle doit déclarer le nom du père :

En 1699 «est baptisé Joseph, né de Marguerite HORVILLE, fille, laquelle a déclaré dans le temps de son accouchement à Louise BONDOIS, sage-femme de la paroisse de La Chaussée, que le dit enfant venait des œuvres du nommé Joseph de LESTOCQ chez qui elle était en service, bourgeois d’Amiens…»

En 1704 «est baptisée Françoise, hors de mariage, fille de Pâquette DOURLE laquelle m’a fait dire par la sage-femme en présence des parrain et marraine soussignés, que l’enfant était des œuvres de François MAGUET…»

En 1715, le 8 février sont nées «Louise et Marie-louise MASSE qu’elle nous a déclaré être des œuvres de Louis MOYE, laboureur à Tirancourt, ce qu’elle a d’abondant protesté en la présence de la Dame MACHET, matrone qui l’a accouchée et qui nous l’a certifié…»

LA MORT EN COUCHES

Les nourrices : Quand la maman meurt en couches, le bébé est placé en nourrice, beaucoup de bébés sont en nourrice à La Chaussée-Tirancourt. Souvent, ils sont enfants de bourgeois ou de commerçants d’Amiens.

Le 19 octobre 1719, Jeanne DEVISMES, 40 ans, meurt en couches, son fils Nicolas est mis en nourrice à Belloy, où il décédera le 14 novembre de la même année.

Le 30 novembre 1744, décès de François CHOQUET en nourrice chez Antoine CARPENTIER.

LA MORTALITE INFANTILE

Les décès de 1716 à 1720
Nombre de décès
0 à 1 an
1 à 5 ans
5 à 12 ans
12 à 70 ans
au dessus de 70 ans
76
20
16
10
19
9
 
27 %
21 %
13 %
26 %
12 %

Comme on peut le voir sur le tableau, 27% des morts ont moins d’un an, 48% ont moins de cinq ans.

Quand on a passé l’âge de 12 ans, on est pratiquement «sauvé»; 12% des morts ont plus de 70 ans, les plus vieux ont 85 ans. Il y a eut même un centenaire en 1749 (Jean VASSEUR dont le fils Charles était clerc-laïc).

L’année 1718 est l’année où l’on compte le plus de décès (30, dont 22 d’enfants de moins de 12 ans).

LES NAISSANCES NOMBREUSES

Entre 1714 et 1728, Jean FOURNY et Marie DADIER ont 7 enfants dont 4 meurent prématurément. Marie DADIER décédera peu de temps après son septième enfant.

François MOYE et Madeleine DEFLANDRE ont 12 enfants en 14 ans, entre 1714 et 1728 (6 meurent avant 10 ans).

Son frère Charles MOYE marié à Madeleine FLAMEN, a 7 enfants pendant la même période.

Charles CUMEL a 6 enfants de 1698 à 1716.

Charles GUIDON et Marie VINCHENEUX ont 14 enfants entre 1704 et 1727. 4 seulement atteindront l’âge adulte.

LES MOIS DE NAISSANCE

Courbe de naissances : périodes 1747 – 1760 , 1771 – 1778 , 1786 – 1791
 
Courbe des naissances

Les baptêmes accusent 3 creux. Les conceptions sont moins nombreuses pendant le Carême (avril), les Moissons (août) et l’Avent (décembre).

J
F
M
A
M
J
J
A
S
O
N
D
Total
37
50
58
34
40
46
50
57
40
38
37
50
537
Nous verrons au chapitre «mariage» que pendant la période des interdits religieux (Avent et Carême), il est interdit de se marier.

 

LES  FIANCAILLES - LE  MARIAGE

LES FIANCAILLES sont «célébrées en notre Eglise à la manière accoutumée», souvent la veille du mariage.

Les bans sont publiés «aux prônes» trois dimanches de suite.

ORIGINE DES EPOUX

Années
Nombre de mariages
Les 2 sont de La Chaussée
Le mari est de La Chaussée
La femme est de La Chaussée
Aucun
1709 à 1715
36
15
10
9
2

Près de la moitié des époux sont du village.

Quand l’un des mariés va chercher son conjoint à l’extérieur, il ne va pas bien loin pour trouver son bonheur: Picquigny, Belloy, Yzeux, Saint-Sauveur, Vignacourt, Vaux-en-Amiénois et Argoeuves sont les pays de prédilection.

Rarement le conjoint vient de plus de 10 kilomètres (Berneuil, L’Etoile, Villers-sous-Ailly…).

A 2 reprises, des domestiques en service à La Chaussée se marient, ayant suivi leurs maîtres qui venaient d’ailleurs.

AGE DES EPOUX

En moyenne, les hommes se marient à 30 ans et les femmes à 24. Les filles se marient plus jeunes que les garçons; il faut dire qu’une partie des jeunes hommes effectue un long service militaire: Charles-Thomas MOYE a servi au Régiment de Barrois de juillet 1777 à août 1785, il a alors 30 ans.
Peu de personnes restent «garçon ou fille à marier».
Un mariage sur trois est un remariage (12/36). Les veufs se remarient plus que les veuves, souvent ils n’attendent pas beaucoup de temps pour se remarier: le 29 avril 1723, Louis CARON se remarie 4 mois après le décès de sa première femme, preuve que la vie est dure et que pour mieux en affronter ses misères, il vaut mieux être deux, surtout quand il y a des enfants à élever.

Marie-Marguerite DUCROTOY (+ en 1773) se maria 4 fois !
Jean VASSEUR (+ le 4 septembre 1749 âgé de 100 ans), il se maria 4 fois.

L'âge des époux

Hommes
V*
V*
*
V*
V*
*
*
*
*
*
*
*
 
*
*
V*
*
Age
70
31
19
37
 
17
29
30
27
 
27
32
 
  
27
50
19
Femmes
 
 
*
*
*
*
*
*
*
*
 
 
*
  
*
 
*
Age
40
24
20
 
 
21
 
18
23
22
26
23
  
  
 
20
23
Mois
F
F
M
M
O
N
J
J
J
M
A
N
J
J
J
J
M
Les 2 de La Chaussée
 
  
x
x
x
x
x
x
x
x
 
 
  
  
x
 
x
Années
1709
1710
1711
1712

Légende : V veuf; * de La Chaussée; J janvier; Jn juin; Jl juillet; M mai; A août

Hommes
 
V*
 
V*
V*
 
 
V*
 
 
 
V*
V*
*
*
*
V
 
 
Age
24
39
 
 
 
32
28
33
24
23
26
40
45
23
24
21
28
 
 
Femmes
*
*
*
*

 

 
*
 
*
*
*
V*
*
*
*
 
 
*
*
Age
13
26
 
32
23
28
22
28
24
21
28
40
24
18
23
19
26
 
19
Mois
F
Jn
A
A
A
O
J
F
Jn
Jl
S
D
J
Jl
Jl
A
A
O
N
Les 2 de La Chaussée
 
x
 
x
 
 
 
 
 
 
 
x
x
x
x
 
 
 
 
Années
1713
1714
1715

LES INTERDITS RELIGIEUX

En Décembre (l’Avent) et en Mars-Avril (Le Carême), il est interdit de se marier. Cependant, après accord de l’évêque, les futurs époux peuvent obtenir une «dispense du temps prohibé»; ainsi, en 1714, deux veufs de 40 ans se remarient en décembre, après avoir reçu l’autorisation des autorités ecclésiastiques.

DISPENSES POUR CONSANGUINITE

Dans bon nombre de cas, la permission de Monseigneur l’Evêque est nécessaire quand on se marie entre cousins (sines); il faut alors une «dispense pour 3 ou 4 degrés de consanguinité».
La dispense du Pape est obligatoire pour 2 degrés de consanguinité.

Années
Nombre de mariages
Nombre de dispenses 3° et 4°
Dispenses du temps prohibé
1709 à 1715
36
2
 
1771 à 1778
35
5
2

AUTRES DISPENSES

Quand il y a urgence, l’évêque peut accorder une «dispense du troisième ban» ou parfois des «2 derniers bans».
Dispense de «plus ample domicile» : ce fut le cas pour Pierre Brunet en 1788.

LES MOIS DE MARIAGES

 
jan
fév
mar
avr
mai
juin
juil
août
sept
oct
nov
déc
1709 à 1715
9
4
0
0
4
2
3
6
1
3
3
1

On se marie surtout en janvier, les périodes d’interdits religieux (Carême et Avent) sont bien respectées.
Les rythmes annuels des mariages et des naissances sont influencés en partie par les préceptes de l’Eglise catholique. En effet, depuis le Concile de Trente (1546-1563), l’Eglise insiste sur le respect de la Pénitence de l’Avent et du Carême, son influence sur la population est très importante; la peur de l’Enfer y est sûrement pour quelque chose.

 

LE  DECES - L'INHUMATION
 

Il arrive que des malades soient transportés à «l’Hôtel Dieu» de Picquigny où ils décèdent, tel Louis BEHEN qui décéda le 19 décembre 1737.

La cérémonie religieuse de l’inhumation a souvent lieu le jour même du décès, quelquefois le lendemain quand la mort survient durant la nuit.

On ne garde pas les corps à cause de l’exiguïté des chaumières et de la peur des épidémies.

Le 25 septembre 1772, Nicolas GAVOIS est inhumé le soir même de son décès à cause de sa «corruption» (état de pourrissement avancé).

Le 23 mars 1782, la jeune Marie-Jeanne DIOT venant de l’Hôpital des enfants trouvés, atteinte de la «petite vérole», décède, elle est inhumée sur le champ.

Décès de soldats : Les miliciens

Le 16 avril 1740, Joseph SAGUIER, soldat milicien, décède en «l’Hôpital Militaire Royal» de Sedan.
Le 11 janvier 1744, Claude HORVILLE décède à Metz.
Le 18 mars 1758, est décédé à l’hôpital de Bergues* St Evinnoc, François CARON, dit «Saint-Martin», milice dans la Bataillon d’Amiens, Compagnie de Goussencourt, natif de La Chaussée et fils de Jean CARON dit «Po» et de défunte Barbe LETITRE, suivant l’ extrait du registre mortuaire du dit hôpital. Signé LECLERC, aumônier et CARLE, commissaire des guerres du 1er Avril.
* il existe un Bergues dans les Flandres où l’on trouve des fortifications et des monuments anciens et un Bergues dans l’Aisne.

Depuis l’ordonnance de LUOVOIS, en 1688, chaque paroisse est obligée de fournir en temps de guerre, des hommes non mariés, de 20 à 40 ans. Ils sont équipés aux frais de la commune.
A partir de 1760, ces milices sont recrutées par tirage au sort parmi les célibataires et les veufs sans enfant, de 16 à 40 ans.
Les plus fortunés peuvent se faire remplacer en payant quelqu’un.
En temps de paix, ces miliciens font de courtes périodes dans une garnison voisine. En temps de guerre, ils sont engagés pour la totalité des hostilités.

INHUMATION DES NOTABLES

L’inhumation se fait dans le cimetière; cependant, plusieurs personnes aisées sont enterrées dans l’église. Ces inhumations, signe de notabilité, ne seront interdites qu’en 1776.

Le 8 juillet 1720, «Charles CAVILLIER, garçon non marié de 75 ans, autrefois marchand apothicaire à Amiens est inhumé dans l’église comme il a témoigné le souhaiter».

Le 28 février 1716, Charles CUMEL, 48 ans, clerc-laïc, est inhumé dans l’église.

Le 10 novembre 1713, François MOYE, 22 ans, dont les parents sont les fermiers de Monsieur de LESTOCQ, est enterré le 11, jour de la Saint-Martin dans l’église de La Chaussée.

Le 22 février 1713, mourut à Picquigny Monsieur Charles ALLIS, 73 ans, «ci-devant curé de La Chaussée», il fut inhumé le lendemain dans l’église.

Le 27 novembre 1713, est décédé à Tirancourt «Messire Adrien de LESTOCQ, chevalier, seigneur de Beaufort, Termont, Belloy, Rivière et autres lieux, ci-devant Lieutenant des Cent Suisses de feu Monsieur frère unique du Roy, gentilhomme ordinaire de la Chambre, inhumé dans la Chapelle castrale de Tirancourt le 28 et le service chanté au dit lieu le 1er jour de décembre en présence de Messire Nicolas de VILLERS, chancelier seigneur de Bourseville châtelain de Famechon et autres lieux et de Messire François MANNESSIES chevalier seigneur de Guibermainil, ses neveu et petit-neveu…»

Agathe ROUTIER est inhumée dans l’église le 12 juin 1749.

Les mois de décès

Périodes : 1747 – 1760 et 1771 – 1792

J
F
M
A
M
J
J
A
S
O
N
D
Total
59
45
52
53
60
44
33
43
51
65
61
48
614

C’est en été qu’il y a le moins de décès.
Janvier, mai, octobre, novembre sont les mois où l’on constate le plus grand nombre de morts.
On meurt surtout à cause d’une absence de soins; seule une forte constitution physique permet de résister aux épidémies.
En plus du manque de médecine, il y a les époques rigoureuses où sévissent le froid et la disette (1709, 1718).
La raison essentielle de la mortalité infantile et du décès lors de l’accouchement est le manque d’hygiène.

Baptêmes - Sépultures - Mariages de 1706 à 1723
 
 
1706
1707
1708
1709
1710
1711
1712
1713
1714
1715
1716
1717
1718
1719
1720
1721
1722
1723
B
22
23
24
16
20
29
23
25
23
25
26
pages
déchi-
rées
21
17
20
19
26
22
S
6
3
18
22
17
15
7
18
15
8
7
30
23
16
13
14
19
M
1
2
0
1
5
6
5
6
6
7
1
1
7
8
5
6
7