LA  CHAUSSÉE - TIRANCOURT
SOUS  L’OCCUPATION  ALLEMANDE

Quelques anecdotes… de Pierre RIFFLART

Le petit Pierre a 11 ans quand il arrive à La Chaussée-Tirancourt, au mois de février 1941. Ses parents viennent de reprendre la ferme de la Carrière tenue auparavant par M. et Mme FALIZE. Il nous livre quelques souvenirs et anecdotes :

Lutte contre les doryphores :

Les doryphores sont un véritable fléau !

Comme il n'y a pas de produits chimiques destinés à leur destruction, les enfants de l'école de La Chaussée-Tirancourt sont réquisitionnés.

Armés de boîtes de conserves et de panniers, les élèves font la chasse aux doryphores.

Les doryphores adultes sont mis dans les boîtes avant d'être détruits.

Les feuilles avec des oeufs collés en dessous sont coupées et brulées afin d'éviter l'éclosion.

 

 

 

 

 

 

 

 

Affiche de mars 1941. Document Dany Dheilly

A.D. SOMME N° 26W828

Le V1 du bois de sapins :

Je me souviens que mon père se rendait souvent près du Bois de Sapins apporter une cuve d’eau. Les Allemands obligeaient les cultivateurs de notre village ainsi que ceux de Belloy à amener 500 litres d’eau pour des constructions qu’ils faisaient dans le bois à l’abri des regards.
Arrivé non loin du bois, un allemand prenait l’attelage et nous interdisait d’aller au-delà.
Mon père cultivait un champ à proximité du bois ; à chaque fois qu’il voulait s’y rendre afin de travailler, il devait se rendre à la Kommandantur située dans la maison Sorel. Il demandait un laisser passer, qu’il devait remettre à une sentinelle placée non loin du bois.
Un jour, en revenant de l’école, mon père me demanda d’aller l’aider à ramasser le foin près du bois de sapins. Arrivés à « ch’Bâton », on entendit des sirènes hurler dans le bois. On se cacha du mieux qu’on put. Des bombardiers alliés venaient bombarder les constructions.
Une fois le bombardement terminé, on se rendit dans notre champ : des dizaines de bombes avaient fait des trous impressionnants. Cela sentait encore la poudre et la poussière. On ne récupéra presque rien du foin.


Des convois bâchés :

On ne savait pas ce que les Allemands bâtissaient, mais ça devait être important, car les alliés y laissaient régulièrement tomber des centaines de bombes.
Par ailleurs, régulièrement on voyait des camions passer avec des convois bâchés.
Que contenaient-ils? Sûrement des V1 ? Les pièces étaient déchargées à la gare de Picquigny, puis acheminées par camions. Ils passaient devant chez moi. Ce n’est qu’après que l’on comprit.
Après la guerre, on récupéra deux chariots en fer qui servaient au transport des V1 dans le Bois. Mon père avait fait un plancher et y mettait de la paille ou du bois. Il n’y a pas longtemps qu’ils ne sont plus dans la ferme.


Les mitrailleuses, les tanks :

Il y avait une mitrailleuse sur le clocher de l’église et une D C A, rue de Belloy.
Dans notre ferme, les Allemands avaient entreposé 8 ou 9 tanks, qui étaient surveillés jour et nuit.
Il nous arrivait aussi d’héberger de chevaux. Je me souviens de belles bêtes appartenant à une fanfare qui est arrêtée quelques jours à La Chaussée avant d’aller en Normandie.



L’école :

J’allais à l’école dans l’ancien presbytère. il n’y avait plus qu’une classe, et notre instituteur M. THÉRY était prisonnier en Allemagne. C’est Madame COUPÉ qui nous faisait la classe.
Les Allemands avaient réquisitionné l’école sur la Place et y logeaient.. Ils avaient aussi un dortoir dans l’ancien café BORDEUX, à l’angle de la Rue de Tirancourt et de la rue de Vignacourt.

À la Libération, quand M. THÉRY a voulu refaire l’école, celle-ci était en triste état, et il a dû faire classe dans la salle du conseil pendant quelque temps.
Voici un extrait du rapport mensuel de l'Inspecteur d'Académie E. MEYER, concernant les écoles en date de novembre 1944, faisant le point sur le mois précédent. Il est donc question que les 2 classes ont repris le 30 octobre 1944 avec une petite anecdote : les garçons sont dans une salle de bal réquisitionnée (le café de la Place de M. LECLERC) 
A.D.SOMME 26W719 - inspecteur E MEYER 11-1944
Document Dany DHEILLY

La libération :

Le 1er septembre 1944, vers 10 heures du matin notre ferme a été incendiée, car des obus étaient tombés dans la paille. Papa resta sur place et obligea ma mère, ma sœur et mes frères à se mettre à l’abri dans les souterrains du Camp de César. Deux allemands qui voulaient se rendre nous accompagnèrent jusqu’à Tirancourt puis prirent peur à la vue de FFI qui venaient de Saint-Sauveur. Je ne sais ce qu’ils sont devenus !
De nombreux habitants de La Chaussée-Tirancourt restèrent à l’abri dans les souterrains. Le soir quelqu’un nous a dit que l’on pouvait rentrer chez nous.