L'OEUF  MIRACULEUX

Je vais rappeler le souvenir d’un fait arrivé à La Chaussée qui a eu un grand retentissement dans le pays.
En 1847, La sœur d’école fit apprendre à ses élèves une pièce de théâtre ; c’était la tragédie de Sainte Philomène, martyrisée sous le règne de l’empereur Dioclétien . Cette pièce de théâtre fut représentée un dimanche après vêpres en face du portail de l’église. se trouvait une grande affluence de spectateurs sur la Place ; les élèves remplirent très bien leurs rôles. Elles reçurent les applaudissements de tout le monde.
Le lendemain, dans la matinée, Rosalie COLET trouva dans son poulailler un œuf sur lequel était écrits ces mots : « Mes enfants, je vous prends sous ma tutelle ; priez, ayez confiance ».
A l’instant même, la renommée prit sa trompette et d’un vol rapide alla publier dans les quatre coins du village cette surprenante nouvelle.
Le monde s’empressa de venir en foule voir cet œuf miraculeux. Il vint aussi beaucoup de monde de Picquigny. Un habitant de ce pays offrit de l’argent pour avoir cet œuf mais Rosalie COLET ne l’aurait pas donné pour une terre. Elle était dans une anxiété sans pareille de ne pas savoir quelle était celle de ses poules qui avait pondu cet œuf là.
Voilà que le lendemain on apprend que l’œuf miraculeux ne venait pas du ciel mais bien de la terre.
C’étaient Monsieur BISSON et le fils de François Laurent CARON qui avaient fait le miracle.
Le jour de la représentation de la Tragédie, ils étaient tous deux qui regardaient du haut de la croisée de la chambre de Monsieur BISSON, qui se trouve au premier étage de l’école, en face de l’église.
C’est à la vue de ces jeunes actrices qu’ils conçurent le dessein de préparer l’œuf. Comme le cœur de M. BISSON soupirait déjà depuis un certain temps pour la fille de Vulfran CARON, ce fut principalement pour cette demoiselle que cet œuf fut préparé. Ce fut à Charles Louis CARON qu’il fut confié pour le déposer dans leur poulailler.
Quand Rosalie COLET sut qu’elle était la dupe d’une telle mystification, elle ferma sa porte et ne voulut plus parler à personne.
Il est bon de faire savoir à ceux qui ne le savent pas que le fils de François CARON était à l’époque étudiant à l’Ecole de Médecine à l’Hôtel Dieu d’Amiens. Ayant reçu quelques notions de chimie, il donna à M. BISSON l’idée amusante de préparer l’œuf.